samedi, 31 mai 2008
À PROPOS DES RETRAITES

Et pourtant, quand on interroge les français, la moitié d’entr’eux sont persuadés qu’on va devoir travailler plus longtemps pour obtenir sa retraite, car ils savent bien que l’espérance de vie ne cessant d’augmenter - donc les années de retraite plus lourdes à financer - il va bien falloir le faire par un moyen ou un autre.
Mais l’autre moitié des français pensent parallèlement que ces manifestants ont eu raison de descendre dans la rue pour se mobiliser, même si, intimement, ils savent bien que les solutions alternatives sont très limitées.
Ce débat n’est pas prêt de se clore : aujourd’hui, on envisage un premier pallier à 41 ans ; mais rien ne laisse supposer qu’il ne devra pas ensuite progressivement aller très au-delà. Et les exemples de nos partenaires voisins ne manquent pas de les édifier : on y prend rarement sa retraite avant 65 ans, parfois pas avant 67 ans. Et pour ne parler que du seul continent européen.
BISMARCK NE L'AVAIT PAS PRÉVU
Quand, en France, on a créé le régime des retraites - c’était en 1945 - la retraite avait alors été fixée à 65 ans. Et l’on savait que l’espérance de vie au-delà de cet âge ne dépassait les 4 ou 5 ans, c’est-à-dire 70 ans tout au plus. Donc la retraite avait été instaurée pour des populations qui étaient appelées à mourir peu de temps après.
Or, en l’espace de 50 ans, l’on a assisté - et c’est fort heureux - à un progrès qui a bouleversé tous les pronostics économiques de l’époque : aujourd’hui quand un retraité prend sa retraite (en moyenne un peu avant 60 ans), il va vivre jusque 25 ans, voire parfois 30, après la cessation de son activité.
Or le système français de financement des retraites est celui dit “par répartition”. C’est-à-dire qu’aucun salarié ne paye quoique ce soit pour sa propre retraite : il paye exclusivement les retraites de ceux qui ont déjà cessé le travail.
Nous allons droit vers une impasse : en 1980 - c’était avant-hier - il y avait 4 actifs pour payer un seul retraité. En 2020 - c’est donc demain - il y aura seulement 1 actif pour payer un seul retraité.
LE PARADOXE FRANçAIS
Alors on voit surgir des “économistes” apportant leur propre solution pour sortir de cette impasse : j’entendais récemment l’un d’entr’eux préconiser une augmentation massive des salaires pour augmenter les ressources des caisses. Je suis resté songeur devant cette proposition. L’êtes-vous moins que moi ?
C’était d’une bêtise rare. Peut-être va-t-on, enfin, se décider à faire l’inverse ?
LES INCOHÉRENCES DE NOS GOUVERNANTS
Ces incohérences dans nos politiques gouvernementales expliquent certainement (en partie) la résistance de l’opinion publique vers une évolution qui a, pourtant déjà, été conduite avec succès dans les autres pays européens.
Il ne sera pas aisé de changer très rapidement les mentalités face au vieillissement constant de notre population. Allez raconter demain aux français que l’âge légal de la retraite sera désormais porté à 65 ans (comme en Allemagne), ou à 67 ans (comme en Suède) ! Nos rues et nos boulevards ne seraient plus assez larges pour accueillir les manifestations que cela entraînerait !
Et pourtant les réalités sont implacables, les chiffres incontournables.
Les étapes seront nombreuses. Mais elles devront toutes être franchies. Un vrai chemin de croix !
22:24 Publié dans BILLETS 2008 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : udf, mouvement démocrate, politique, bayrou, débats de société
LA QUALITÉ ESSENTIELLE DE LA FEMME

Voilà une bien curieuse interprétation de l’article 180 du Code Civil. Jusqu’à présent, on considérait que l’annulation d’un mariage pouvait se justifier si l’un des conjoints, par exemple, avait caché qu’il était divorcé (ou était encore marié), ou avait menti sur sa nationalité, ou encore était sous curatelle, ou n’était pas apte à entretenir des relations sexuelles normales, etc.... Bref des raisons “essentielles” qui faisaient qu’un mariage était viable ou pas dès le premier jour. Oui, là, un juge était fondé de déclarer nul un mariage.
Mais annuler un mariage parce que la mariée n’était plus vierge le jour de ses noces et l'avait caché, est-ce une raison ? Le marié (d’un certain âge quand même et apparemment bien intégré dans la vie sociale), lui, était-il encore puceau le jour de son mariage ? N'a-t-il jamais menti ? Peut-il en apporter les preuves ? Et si la mariée s’était fait réparer l’hymen (opération très banale pratiquée couramment et sans anesthésie ni hospitalisation), le mensonge aurait-il été différent ? Et pourquoi avoir choisi la voie de l’annulation alors qu’un divorce à l’amiable pouvait être prononcé si les deux parties en étaient d’accord. Que va donc devenir cette femme honteusement répudiée ? Y a-t-on pensé ?
On se croirait revenu au Moyen-Âge où l’on mettait au bûcher les femmes dont on doutait de la moralité des mœurs.
Ce jugement de Lille est une grave remise en cause de la laïcité et du droit de la femme. C’est encore une remise en cause du droit de chacun de disposer de son corps. C’est un pas en arrière et à contresens des droits de l’homme (et de la femme) inscrits dans notre Constitution.
Ce juge lillois a déshonoré la Justice, quoiqu’en dise Mme Dati. On ne peut se désintéresser d’une question d’une telle importance. C'est une vraie priorité pour notre société.
12:22 Publié dans SOCIÉTÉ | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : udf, mouvement démocrate, politique, bayrou, débats de société
mercredi, 07 mai 2008
À PROPOS DE MAI 68
Qu’en est-il au juste ?
Si l’on veut tenter de comprendre ce qui s’est passé en 68, il faut d’abord constater que la société d’alors - même si certains sentaient l’orage venir - a été brutalement confrontée, tel un éclair paraissant dans un ciel serein, d’une part, à une contestation d’étudiants qui se sont mis à tenir des discours hyper révolutionnaires, maoïstes, trotskistes, anarchistes - c’est-à-dire tous dirigés contre la société de consommation en général - et, d’autre part, à une autre contestation, celle de toutes les valeurs traditionnelles et des structures autoritaires.
D’aucuns affirment que cette contestation s’inscrivait, en fait, assez logiquement dans la lignée de celle qui avait germé lors des années 1850-1880, années où déjà des petits groupes d’étudiants ou d’intellectuels - qu’on désignait alors par les sobriquets les plus divers (“m’en-foutistes”, “fumistes”, “hydropathes”, “hirsutes” “Chats Noirs”, “incohérents”, etc....) - avaient commencé à contester la société hyper-rigide de l’époque. Ils font figure d’ancêtres précurseurs de nos contestataires de 68.
Pourtant, en Mai 68 et assez curieusement, on observe que cette volonté proclamée à grand tapage de détruire les valeurs traditionnelles de la société, elle-même héritière d’un passé multi-séculaire, cette volonté destructrice va, contre toute attente, voir éclore, non pas le socialisme, ni davantage une amorce de révolution, mais une nouvelle société, celle de.... l’hyper-consommation : c’est en effet à cette date que les français sont rentrés de plein pied dans la société libérale. Et loin de condamner la société de consommation, Mai 68 l’a fait croître et a fait naître la nouvelle modernité, celle où nous sommes aujourd’hui.
Ce n’est pas là le moindre paradoxe de Mai 68. On pourrait en déduire - et certains chroniqueurs l’ont affirmé avec force - qu’il était nécessaire que certaines valeurs traditionnelles fussent détruites pour que nous entrions dans cette société de consommation. Si rien n’avait alors changé, jamais nous y serions rentrés, là où nous achetons désormais tout et n’importe quoi, y compris des produits jetables, des gadgets les plus loufoques, parfois totalement inutiles. Mai 68 nous a fait déboucher sur le capitalisme le plus arrogant qui soit. Et les “soixante-huitards”, qu’on voyait alors sur les barricades ou dans les piquets de grève, se sont vite reconvertis à cette société et certains y ont fait de très belles carrières bien juteuses.
Mai 68 n’a donc été finalement - on peut le supposer - qu’une ruse de l’Histoire pour permettre à une société qui était très en retard, non seulement dans ses structures sociétales mais aussi celles économiques, de s’ouvrir sur la modernité. Nous avons vu, sous des apparences révolutionnaires - les barricades, les pavés, etc.... - l’émergence d’un nouveau capitalisme.
On pourrait croire, à ce que je viens d’exposer, que Mai 68 n’a eu que des effets contraires de ceux qui avait fait naître cette vague déferlante. Non, bien des choses ont aussi changé par ailleurs. Et pas des moindres.
Mai 68 a aussi marqué la fin, en France, du parti communiste : celui-ci n’y survivra pas.
Ensuite, Mai 68 a marqué la fin de l’Université traditionnelle. C’est la fin des cours magistraux, la fin d’une certaine hiérarchie. Le seul problème c’est que, depuis, on n’a rien mis à la place.
Ensuite encore, Mai 68 a marqué la fin de la civilisation ouvrière et de sa structure syndicale qui, jusque là, l’encadrait sans conteste. Cela peut paraître paradoxal que de l’affirmer quand, en Mai 68, on a bien eu une grève ouvrière de plusieurs millions de personnes, grève aussitôt suivie de conquêtes sociales sans précédent depuis 1936 (accords de Grenelle). Mais, à partir de là, la société ouvrière a cessé d’être une société fermée, y compris face à ses syndicats : elle n’a pas été, contrairement aux habitudes, le déclencheur des événements, loin de là, mais s’est trouvée face à quelques hurluberlus qui ont mené la danse jusqu’au bout. Les rapports de classes ont alors changé.
Pour poursuivre encore plus loin dans les changements, on peut dire aussi que Mai 68 a marqué la fin des rapports familiaux : l’homme était traditionnellement le chef de famille à l’autorité incontestée, l’épouse était étroitement dépendante des seules décisions du mari (jusque 1975 encore !). Même pour ouvrir un compte en banque, ou prendre la pilule, la femme devait avoir l’accord du mari ! Mai 68 a donc aussi été le déclencheur de la libération de la femme dans la société.
Mai 68 a aussi ouvert la voie de la libération sexuelle. Même s’il a fallu encore quelques années d’attente pour voir adopter les lois qui l’ouvraient réellement dans les faits, il est sur, que, sans Mai 68, ces lois n’auraient jamais vu le jour. Ou quand ?
Mai 68 n’aura pas conduit, sur le plan politique, au changement d’un seul des articles de la Constitution de 1958 fondée par De Gaulle dont on cherchait à chasser le système : mieux, Mitterrand, qu’on a vu alors soutenir les contestataires, une fois élu Président, ne changera pratiquement pas une ligne à la Constitution.
Mai 68 a donc permis surtout une réelle émancipation. La société était alors très corsetée : que ce soit la famille, l’Église, l’Université, l’administration, la politique, cette société n’avait subi aucun grand changement depuis le 19° siècle, même après le conflit de 14-18. Mai 68 a donc vu tout çà exploser comme dans une sorte de joyeux feu d’artifice. Çà nous éloignait des grèves ouvrières, souvent lourdes et tristes, qu’on avait connu dans le passé.
Émancipation, donc, il y a eu : il y en a eu de très positives (lois Auroux, démocratisation dans les entreprises, etc....). Il y a eu aussi, hélas, d’autres beaucoup moins : dans l’école surtout, le déclin de tous les enseignements traditionnels, de la civilité, de la politesse, de l’autorité des maîtres, de la morale, des règles civiques, etc.... Et aussi, l’enseignement de la lecture qui découlait naturellement de la contestation de la chose écrite.
L’émancipation de Mai 68 a donc été une sorte de reconquête de la liberté. Comme toute conquête - et 1789 en a été une illustration emblématique - elle a eu sa part de lumière comme d’ombre. On ne pouvait y échapper.
19:26 Publié dans BILLETS 2008 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : udf, mouvement démocrate, politique, bayrou, débats de société